Les îles de la « saudade »
Anticyclone sur les Açores : neuf îles, chacune différente, chacune avec un caractère particulier. Mais toutes sont d’un romantisme sauvage et d’une âpre beauté. Voyage en photos au cœur de l’Atlantique.
Par Simone Leitner, bonaLifestyle
Un groupe d’îles au relief accidenté, très à l’écart de l’Europe, un archipel pour individualistes, un eldorado pour ceux qui aiment s’aventurer hors des sentiers battus : randonneurs, amoureux de la nature, sportifs, aventuriers, gourmets et Bons vivants trouveront leur bonheur aux Açores. Ce groupe d’îles à caractère bien trempé et aux beautés naturelles poustouflantes a été épargné jusqu’ici par le tourisme de masse. On ne trouve nulle part de hideuses barres d’immeubles touristiques venant gâcher la vue sur la mer, ni d’attrape-touristes à en couper l’appétit des voyageurs. Il semble que le temps s’écoule à un rythme un peu plus lent dans ces îles situées au beau milieu de l’Atlantique.
A deux heures de vol du Portugal, les voyageurs en quête d’écotourisme atterrissent dans des oasis de verdure. Elles se nomment Corvo et Flores, Faial et São Jorge, Graciosa et Terceira, Santa Maria et São Miguel. São Miguel, où se situe la capitale Ponta Delgada, est la plus grande île des Açores. La saison touristique s’étend d’avril à octobre, mais à vrai dire les Açores ne connaissent pas réellement de haute saison, le climat réserve des moments forts tout au long de l’année. L’archipel fait parler de lui surtout à travers les prévisions météorologiques. L’annonce «… anticyclone au-¬dessus des Açores » est généralement une promesse de beau temps.

Que l’on parte à la découverte des îles au plus près de la nature en empruntant d’anciens sentiers muletiers, ou bien en voiture – les vues sur les eaux bleu azur de l’Atlantique sont à couper le souffle. En été, quand la température grimpe à un peu plus de 30 degrés, des plongeurs se pressent au large des côtes dans l’espoir d’apercevoir des baleines, des dauphins ou même des requins. La chasse à la baleine était encore pratiquée aux Açores au XIXe siècle, mais désormais seuls s’y risquent les touristes armés d’appareils photos ou de caméras.
Neuf îles, d’innombrables aventures en perspective : chaque voyage aux Açores recèle des trésors de découvertes. Savez-vous par exemple comment on cuisine à basse température aux Açores ? Dans des sources chaudes naturelles. Les Açores sont des îles volcaniques et partout, des fumerolles jaillissent des entrailles de la terre. Reto Amin, agent de voyage et fin connaisseur de l’archipel, nous en dévoile les secrets.

bonaLifestyle : Reto Amin, le temps semble s’être arrêté aux Açores. Comment ressentez-vous l’évolution dans cet archipel unique en son genre ?
Reto Amin : Effectivement, le temps semble comme suspendu sur de nombreuses îles : partout domine encore un paysage très rural, on profite pleinement de la nature. Ces dernières années, il y a eu cependant certains changements positifs, surtout au niveau de l’infrastructure. Ainsi par exemple, de nombreuses routes ont été rénovées et les sentiers de randonnée ont été continuellement développés et signalisés.
Aucune des neuf îles ne compte de gigantesques complexes hôteliers. Comment cette destination a-t-elle réussi à se protéger du tourisme de masse ?
Les Açores ont toujours été et demeurent un secret bien gardé. Certes, quasiment tout le monde connaît les Açores à travers les bulletins météorologiques (anticyclone des Açores), mais de là à savoir qu’il s’agit d’un groupe d’îles et d’une destination de voyage, presque personne n’en est conscient. Les longues plages, l’eau chaude et la garantie d’avoir du soleil, voici les éléments qui drainent le tourisme de masse. Il y a bien sûr de magnifiques plages aux Açores, mais l’eau y est relativement fraîche avec un maximum de 22 degrés. En outre, la météo est très changeante. Cela n’est pas idéal pour le tourisme balnéaire, mais par contre des paysages splendides baignent les Açores tout au long de l’année, composés de subtiles nuances de verts et d’une flore extraordinaire.
Les Açores sont donc à la mode ?
Absolument. Les gens recherchent des destinations inconnues, pas trop lointaines et pas encore envahies par les touristes. C’est ce que l’on trouve aux Açores : une nature presque intacte et des paysages uniques, à seulement cinq heures de vol de la Suisse, avec des températures douces toute l’année durant.
Ces îles ont-elles également beaucoup à offrir aux non-randonneurs ?
De nombreuses personnes préfèrent découvrir les îles confortablement en voiture de location plutôt qu’à pied. Partout de beaux points de vue s’offrent aux visiteurs, d’où l’on a de splendides panoramas sur la mer, la campagne ou les lacs de cratères. Il n’y a donc aucune obligation de randonner à tout prix.
Il existe aussi trois parcours de golf exceptionnels. Proposez-vous également des séjours aux Açores pour passionnés de golf ?
Sur l’île de São Miguel ainsi qu’à Terceira, on trouve en effet de beaux terrains de golf. On peut parfaitement passer une semaine à jouer au golf aux Açores. Beaucoup de golfeurs combinent cependant leur séjour ainsi : le matin, parcours sur le « green » et l’après-midi, découverte des îles.
Aux Açores, le luxe signifie avant tout nature et authenticité. Avez-vous l’impression que les voyageurs apprécient de plus en plus ces valeurs ?
Effectivement, la mode est à une nature intacte et à la découverte de lieux peu connus, ce qui correspond typiquement aux Açores. Les Suisses ont de toute façon cultivé depuis longtemps des liens privilégiés avec la nature et passent volontiers leur temps libre en forêt ou en montagne. Ces éléments se reflètent dans le choix d’une destination de vacances.


Y a-t-il aussi des plages dans l’archipel des Açores, ou des vacances balnéaires sont-elles inconcevables ici ?
Ceux qui souhaitent passer toute la semaine sur une plage ne sont certainement pas au bon endroit aux Açores. Mais les vacanciers qui désirent se détendre quelques heures à la plage de temps en temps et se baigner dans l’Atlantique le peuvent sans problème.
Qu’en est-il des piscines thermales, sont-elles très appréciées et renommées ?
La plus connue et l’une des plus belles piscines thermales se situe dans un endroit de rêve, le parc de Terra Nostra à Furnas, sur l’île de São Miguel. Aucun visiteur ne saurait manquer l’occasion de venir s’y baigner. Sur São Miguel également, la Caldeira Velha est une cascade d’eau chaude située dans un environnement idyllique. Mais au bord de la mer aussi, en plusieurs endroits des îles, des sources chaudes viennent adoucir sensiblement la température des eaux froides de l’Atlantique.
L’observation des baleines et des dauphins figure en tête de liste de ce qu’il faut voir à tout prix aux Açores. Quelle est la saison la plus favorable pour assister à ce spectacle ?
On rencontre des dauphins toute l’année au large des Açores. En mars et avril, ce sont surtout les grands cétacés à fanons (baleine bleue, rorqual commun, rorqual boréal, etc.) qui croisent dans les eaux de l’archipel. D’avril à octobre, ce sont en revanche les cachalots qui se donnent en spectacle en présentant comme par jeu leur nageoire caudale aux photographes.
Vendez-vous ces excursions seulement aux groupes ou aussi aux voyageurs individuels ?
La plupart de nos clients sont des voyageurs individuels. Cela signifie que nous réservons le vol, la voiture de location et l’hébergement. Nous donnons en outre quotidiennement des conseils d’excursions, afin que personne ne passe à côté des curiosités à voir absolument. Mais chacun est libre de suivre nos conseils ou d’organiser son propre programme de visites. Pour les voyageurs qui désirent des informations plus approfondies, nous mettons sur pied des excursions avec guide individuel, mais nous n’organisons pas de voyages de groupes.

Quels sont vos endroits préférés sur les îles ?
Il y en a plusieurs. L’île de Faial me plaît beaucoup ; à partir de juin, elle est couverte d’un tapis d’hortensias bleus, un spectacle unique. Mais une randonnée autour du lac de cratère Lagoa do Fogo sur São Miguel ou dans l’île pratiquement intacte de Flores est une expérience inoubliable. Et je ne me fatigue jamais des observations de baleines et de dauphins. Chaque sortie est différente, on ne sait jamais ce que l’on va voir et découvrir. La nature nous réserve à chaque fois de belles surprises.
Et le mythique Peter Café Sport à Horta sur l’île de Faial ? Est-il aujourd’hui encore un point de rencontre et d’ancrage pour passionnés de la voile du monde entier ?
La plupart des navigateurs qui traversent l’Atlantique passent effectivement par les Açores et une escale à Horta est dès lors incontournable. Premièrement, on sert au Peter Café Sport le meilleur gin tonic de toute la traversée entre Europe et Amérique, et deuxièmement aucun marin ne saurait quitter l’île sans laisser en souvenir un dessin ou une peinture sur le mur du port d’Horta. Sinon, il risquerait d’avoir de la malchance dans la poursuite de son voyage, selon une vieille superstition. Mais l’établissement est ouvert aussi aux non-navigateurs et une promenade le long du port paré de toutes les couleurs est un enchantement pour les yeux.
Quels restaurants conseilleriez-vous tout spécialement aux visiteurs ?
Parmi les neuf îles, c’est une question difficile car chacune a ses propres spécialités et il y a partout d’excellents restaurants. A Furnas, sur l’île de São Miguel, il faut absolument goûter au cozido. C’est un pot-au-feu typique des Açores, comprenant plusieurs couches de légumes et différentes sortes de viandes, mijoté à basse température pendant des heures à la chaleur des fumerolles provenant de la caldeira.

Qu’en est-il des homards, huîtres et autres spécialités de fruits de mer ?
Aux Açores, il est possible de déguster pratiquement tous les produits de la mer. On sert volontiers de l’espadon ou du thon frais, que l’on chasse encore traditionnellement au harpon en bois, contrairement à la pêche industrielle au chalut – car aux Açores, on accorde beaucoup d’importance au respect de l’environnement. Les fins gourmets se laisseront tenter par les « lapas », des crustacés appelés pouces-pieds ou bernacles en français. Tous les restaurants de poisson servent aussi du homard et de la seiche ou du calamar. Ceux qui n’arrivent pas à se décider pour l’un ou l’autre de ces crustacés devraient essayer l’« arroz de marisco » – un plat de riz accompagné de divers fruits de mer.
Il y a aussi des vignobles sur les îles de Graciosa, Terceira et Pico. Que pensez-vous des vins produits dans la région ?
A ma connaissance, Robert Parker n’est encore jamais venu aux Açores, il a donc certainement manqué quelque chose. En effet, les tsars de Russie savaient déjà apprécier le vin ample et généreux des Açores et en importaient dans leur pays. Sachant tous les sacrifices qu’exige la production de vin, il faut avouer que les vins de l’archipel présentent un remarquable rapport qualité-prix.